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Du 29 novembre 2025 au 22 mars 2026
Rodez
parcours au fil des collections permanentes
Depuis plusieurs années, le musée Soulages propose des rencontres ponctuelles entre ses collections permanentes et d’autres créations anciennes et contemporaines. Ces dialogues offrent des résonances fécondes pour penser l’œuvre de Pierre Soulages et renouveler sans cesse le regard qu’on porte sur elle. En 2020, le musée accueillit ainsi le Prince de Gudea, statue acéphale en diorite noire du Musée du Louvre (2120 avant JC) ; l’eau-forte de Rembrandt, Faustus (1652), un lavis de Victor Hugo ; et le Bord de mer à Palavas de Gustave Courbet (1854), issu des collections du musée Fabre de Montpellier. Tout cela, à l’occasion des cent ans du peintre. En 2022, ce fut Pedret (2015), une céramique géante noire, sphérique, de Claudi Casanovas, dans le cadre de l’exposition « RCR arquitectes, Ici et ailleurs. La matière et le temps ».
En 2023, le musée Fenaille nous prêtait une statue-menhir, la stèle de la Verrière. À l’été 2024, Jeanne Vicerial, artiste plasticienne du textile, occupait une partie de la salle 5, avec la Gisante et les Sex-Votos. C’est dans la lignée de ces expériences riches en découverte que le musée Soulages a imaginé, à partir du 29 novembre 2025, un parcours donnant à voir un ensemble de céramiques et de verres de Bernard Dejonghe. Ce parcours autres noirs visible au fil des collections, dont les oeuvres viennent ponctuer la déambulation, est le fruit de visites régulières du céramiste dans le musée de Rodez depuis 2022.
Bernard Dejonghe, né en 1942, est l’une des figures majeures de l’art de la céramique français. Installé depuis 1977 à Briançonnet, dans les Alpes Maritimes, il rompt avec les approches illustratives ou décoratives pour privilégier le geste et son processus, le dialogue de la matière avec la lumière, un aspect qu’il partage avec l’art de Pierre Soulages. S’inscrivant dans la tradition de l’émail sur grès, Dejonghe se consacre également à une diversité de techniques, notamment à la fusion et à la mise en forme du verre. En 2001, il obtient le Prix Liliane Bettencourt pour l’intelligence de la main, puis est nommé Maître d’art en 2006. Ses créations sont visibles dans de nombreuses collections publiques de par le monde. Céramiste aventurier, Dejonghe a arpenté le désert du Ténéré avec Théodore Monod qui le guida, rencontré les Toubous et les Touaregs, évalué la genèse immémoriale des poteries. Ses voyages l’ont mené en Mongolie, au Niger, au Chili (le désert d’Atacama) sur la trace des météorites. Il a traqué les oxydes de cuivre pour raviver un rouge à la fois vivant et éreinté. L’artiste œuvre en véritable alchimiste, s’intéressant à l’aspect tellurique des matières, à la puissance du feu, de la lave et de la terre, dans tout ce qu’elles recouvrent de hasard et de mystère. Cette préhistoire de l’art est là encore un point d’union avec l’œuvre de Pierre Soulages, qui n’a eu de cesse, à la fin de sa vie, de parler du noir absolu des astrophysiciens, obscurité sans limites piquée et interrompue par des lumières inaccessibles. Pour sa part, Dejonghe ne cesse de mettre à l’épreuve sa «matériologie», une géologie, une science au service de l’art et de la poétique. Autres noirs célèbre la couleur noire et la lumière. Il s’agit de porter un regard sur la céramique contemporaine, dans un musée monographique voué en grande partie à la peinture.
Le parcours autres noirs bénéficie de l’aide à la production de trois galeries : Capazza, Nançay (18), Le Don du Fel, Le Fel (12) et Hélène Aziza, 19 Paul Fort (Paris). Ce projet initié par Benoît Decron, alors directeur du musée en 2023, trouve aujourd’hui son aboutissement grâce à leur soutien décisif et à l’accompagnement sans faille de l’artiste.